Le Conseil de sécurité a entamé mardi à New York ses premières discussions sur la Minurso (Mission de l’Onu pour l’organisation d’un référendum d’autodétermination au Sahara Occidental), sur fond de blocage du processus onusien.
Les discussions cette année se tiennent dans un contexte très particulier, au moment où le Maroc bloque toute initiative d’un règlement de la question sahraouie. Les répercussions de la crise qu’il a provoquée à El Guergarat et le retour de la Minurso à la pleine fonctionnalité devraient dominer ces consultations à huis clos sur le Sahara Occidental. Elles interviennent également quelques jours après que le SG de l’ONU, Antonio Guterres, a transmis son premier rapport sur le Sahara Occidental au Conseil de sécurité et dans lequel il a promis de relancer les négociations, à l’arrêt depuis 2012, avec «une nouvelle dynamique».
Le Conseil de sécurité avait enjoint au secrétariat général de faciliter des négociations directes entre les deux parties qui doivent aboutir à l’autodétermination du peuple sahraoui, a indiqué M. Guterres. Le chef de l’ONU prévoit déjà de nommer l’ancien président allemand, Horst Kohler, comme son nouvel envoyé personnel pour le Sahara Occidental pour tenter de relancer les négociations après la démission de l’américain Christopher Ross.
Le rôle que devrait jouer Kohler, une fois nommé, est un élément important dans le processus de paix au Sahara Occidental, mais il ne sera pas décisif sans le soutien du Conseil de sécurité. Avant lui, Ross a été l’objet d’une opération de sabotage franco-marocaine au Conseil de sécurité et ne pouvait pas aller loin dans sa mission sans le soutien de l’organe onusien. En attendant la nomination du nouvel émissaire onusien, le Conseil de sécurité devrait procéder jeudi à l’adoption du projet de résolution prorogeant d’une année le mandat de la mission des Nations Unies pour l’organisation d’un référendum au Sahara Occidental. Le projet de résolution a été élaboré cette année par les Etats-Unis qui assurent la présidence tournante du Conseil de sécurité pour le mois d’avril. La première mouture du document fait déjà l’objet d’intenses négociations au niveau de l’organe onusien.
Divergences
Le Conseil de sécurité, réuni mardi, pour examiner un projet américain de résolution sur le Sahara Occidental n’est pas parvenu à un consensus, les premières discussions ont révélé de grandes divergences entre les membres de l’organe onusien. Le projet de résolution visant la relance des négociations entre le Front Polisario et le Maroc a été soumis dans un premier temps au groupe d’amis du Sahara Occidental au Conseil de sécurité mais sans dégager un consensus sur ses propositions, notamment celle exigeant le retrait immédiat du Front Polisario de la zone d’El Guergarat.
Devant le refus de plusieurs membres de valider un texte biaisé, la délégation américaine aux Nations Unies a soumis ce projet de résolution au reste des membres du Conseil de sécurité, mais les tractations restent serrées avant son adoption prévue jeudi. La Russie a qualifié le texte de déséquilibré, alors que l’Uruguay a estimé qu’il ne fournit pas les causes qui étaient à l’origine de la crise d’El Guergarat, en référence à la violation de l’accord de cessez-le-feu par le Maroc qui a provoqué les tensions dans cette zone tampon surveillée par la Minurso. «Le Maroc et la France sont en train de pousser à l’extrême jusqu’à demander le retrait immédiat et sans condition du Front Polisario d’El Guergarat», a déclaré à l’APS le représentant du Front Polisario auprès de l’ONU, Ahmed Boukhari.
La France et quelques amis inconnus du Maroc ont eu une grande influence sur la rédaction de la première mouture du projet, selon lui. Pour El Guergarat, «il fallait s’attaquer aux causes et aux conséquences de la crise», a affirmé M. Boukhari en précisant que le problème a commencé quand le Maroc a voulu achever un projet de route traversant cette zone interdite par les accords militaires. «La violation des termes de cessez-le-feu était à l’origine de la crise et met en péril tout le processus de paix au Sahara Occidental», a-t-il ajouté.
Le Front Polisario a proposé aux Nations Unies l’envoi d’une commission technique pour examiner sur le terrain la violation du cessez-le-feu, mais la France et le Maroc s’y sont opposés en essayant d’impliquer le Conseil de sécurité dans la légitimation des actes de Rabat. Il a considéré qu’il était essentiel de tenir compte de l’échec des négociations de Manhasset en 2007 en intégrant dans ce projet de résolution «des éléments pour que les nouvelles négociations auxquelles le secrétaire général appelle puissent avoir une perspective de succès». «Certaines déclarations françaises sur cet aspect sont contaminées d’une certaine légèreté et d’une certaine complicité, tout en sachant que le Maroc ne va pas coopérer dans le cadre d’une négociation sérieuse et crédible», a-t-il relevé.
M. Boukhari a fait savoir que le Front Polisario allait «attendre la fin des discussions sur ce projet de résolution pour se positionner publiquement sur l’ensemble du processus de paix, y compris sur la situation à El Guergarat».