Dans un long entretien publié ce mercredi 28 mars dans Le Point Afrique, Ali Haddad a passé en revue bon nombre de sujets, de la situation économique actuelle de l’Algérie aux défis à venir en passant par la question cruciale des investisseurs étrangers.
Après avoir rappelé la stabilité économique du pays « malgré la baisse des revenus issus des hydrocarbures », le président du Forum des chefs d’entreprises (FCE) a mis l’accent sur « la période charnière » dans laquelle se trouve l’Algérie « où son modèle économique est en pleine mutation avec une émergence sans précédent du secteur privé ».
Le patron des patrons s’est épanché sur ce sujet, évoquant les atouts dont recèle l’Algérie pour attirer les investisseurs étrangers. À commencer par son emplacement stratégique.
« Quand on est un investisseur, on évalue le rapport rendement/risque et je pense que l’Algérie offre l’un des meilleurs rapports rendement/risque de la zone », soutient-il.
Privatisation et investissements venus de l’étranger
Puis il a évoqué le potentiel encore inexploité du pays. « L’Algérie est la quatrième économie du continent africain avec des gisements d’opportunités importants qui ne sont pas encore exploités. L’immensité du pays et la taille de sa population (40 millions) en font par exemple un des plus gros marchés méditerranéens pour le développement des technologies de l’information et de la communication. On le sait peu, mais l’Algérie est l’un des rares pays en Afrique à disposer de plusieurs milliers de kilomètres de fibre optique. Par exemple, la route transsaharienne qui relie Alger à Tamanrasset sur 3 000 km sera totalement équipée en fibre optique », développe Ali Haddad, affirmant aussi que « l’Algérie peut devenir un acteur majeur dans le processus d’électrification du continent africain. »
Le patron du groupe ETRHB, qui estime que l’entreprise privée « devient progressivement le moteur du développement », a balayé l’idée que la règle 49/51 représentait un frein aux investissements étrangers.
« Cette règle n’a jamais constitué une source de blocage pour les investissements directs étrangers. D’ailleurs, après son entrée en vigueur (NDLR en 2009), il n’y a pas eu une baisse substantielle de ce type de projets. Les entreprises étrangères avaient des appréhensions au début, mais elles ont très vite compris que cette mesure n’était pas de nature à entraver leurs investissements », défend-il.
Et d’ajouter : « Par ailleurs, même sans ce cadre, il est, en Algérie, toujours préférable de s’associer à un partenaire local pour gagner en temps et en efficacité. Aujourd’hui, contrairement à ce qui peut se dire, l’essentiel des sociétés détenant des parts sociales dans les sociétés algériennes récupèrent leurs dividendes sans difficulté. »
Ali Haddad a toutefois précisé que « le FCE a préconisé une réforme fondamentale, celle de la gouvernance de l’administration ».
L’Afrique, l’enjeu de demain
Le chef du FCE a ensuite livré son avis sur l’avenir économique de l’Algérie. Un avenir qui pour lui doit absolument intégrer la jeunesse du pays, « la priorité de son mandat ». « J’ai d’ailleurs créé le “Jil’FCE” qui fédère les membres du FCE de moins de 40 ans. La structure actuellement dirigée par Mohamed Skander est très active et a signé beaucoup de conventions avec les banques, la Bourse, les grands donneurs d’ordre comme Algérie Télécom pour aider des milliers de jeunes entrepreneurs dans leurs démarches. Plus généralement, l’employabilité des jeunes ne peut être qu’un bon investissement », soutient-il.
Espérant que la création récente du conseil d’affaires algéro-français donne des premiers résultats « visibles très rapidement », Ali Haddad considère l’Afrique comme « une priorité absolue pour le FCE » et compte faire de l’Algérie « l’une des locomotives » du continent.
« Les entreprises algériennes saisiront toutes les occasions pour exporter et s’implanter en Afrique, en particulier sur les marchés où la demande est forte et en commençant par les secteurs où elles sont déjà leaders en Algérie et dans lesquels elles ont un savoir-faire : l’agro-industrie, l’énergie, l’industrie pharmaceutique, le BTP, les services et les infrastructures », explique-t-il. Un challenge auquel prendra part également son groupe de BTP.
Ali Haddad a défendu par ailleurs l’idée que l’entreprise doit avoir une conscience sociale, s’attardant particulièrement sur le cas des personnes en situation de handicap.
« Nous sommes très engagés en faveur de l’insertion économique et sociale de ces personnes. Récemment, le Forum des chefs d’entreprises a décidé de créer une fondation dédiée aux actions de solidarité portées par ses membres. Cette fondation sera implantée dans les 48 délégations de wilayas que compte le FCE à travers le pays, avec également un projet de réalisation d’une école pour les personnes à mobilité réduite dans la commune de Sidi Abdallah à Alger », indique-t-il.
Et de conclure l’interview sur cette vision enthousiaste : « Je reste convaincu que l’Algérie est prête à mobiliser toutes ses forces vives et à s’appuyer sur l’ensemble de ses ressources pour réussir le pari de l’émergence économique, et en particulier sur les ressources de son secteur privé. »
TSA