Cela pourrait être le cas. Avec les défections de nombreux démocrates et des islamistes qui, sous le motif global de l’absence de garanties d’une élection libre et transparente, n’ont pas voulu présenter, jusqu’à présent, leurs candidats, le prochain scrutin risque de se transformer en une compétition à l’intérieur du système. Les noms sont déjà connus. Si ce n’est pas le président Bouteflika, très affaibli par sa maladie, qui briguera une quatrième mandature, ce seront des personnalités politiques dites issues du système qui se positionneront sur les starting-blocks pour tenter d’accéder à la magistrature suprême. En plus de Ali Benflis, qui est déjà candidat à la candidature, les noms de Mouloud Hamrouche (ex-Premier ministre du président Chadli Bendjedid) et Ahmed Ouyahia (ex-Premier ministre du président Bouteflika) reviennent cycliquement au devant de la scène comme probables prétendants à la présidence. Ce qui présagerait d’une compétition arbitrée par les différents tenants du pouvoir.
Le changement n’interviendra pas à l’occasion du rendez-vous d’avril prochain. C’est ce que pense le politologue Rachid Tlemçani. Selon lui, il n’y a absolument aucun signe qui montre une volonté du système de s’ouvrir. Ni de l’intérieur ni de l’extérieur. «Pour que le système s’ouvre de l’intérieur, il faudrait qu’il subisse des pressions de l’intérieur et de l’extérieur. De l’intérieur, les pressions sont très faibles. Les partenaires étrangers souhaitent la consolidation du système de prédation et de corruption», explique Rachid Tlemçani, en affirmant que les conflits à l’intérieur du système existent, d’autant plus que les acteurs ne se sont pas entendus sur un élément et un candidat commun. Cependant, estime Rachid Tlemçani, un scénario reste vraisemblable pour l’instant ; il s’agit de la candidature de Bouteflika qui sera suivie par une révision de la Constitution juste après l’élection. «Le scénario le plus plausible est qu’il (Bouteflika, ndlr) va se représenter. Et au lendemain de cette élection, il révisera la Constitution. Dans cette révision, il y a un point cardinal qui est l’instauration du poste de vice-Président. Ce dernier va assurer l’intérim en attendant de trouver un candidat du consensus», dit-il, précisant que cela dépend néanmoins de la capacité de Abdelaziz Bouteflika à mener une campagne électorale.
Le statu quo
Notre interlocuteur estime, toutefois, qu’il y a toujours des secrets qui peuvent être révélés à l’occasion de ce scrutin. «Même s’il y a ouverture du système, le prochain candidat pourrait ne pas être une personnalité que l’on connaît. Ce ne serait probablement pas un civil», soutient-il. Selon lui, les noms présentés jusque-là comme de sérieux candidats ne feront que renforcer le statu quo, y compris Ali Benflis.
Intervenant sur son compte facebook, Abdeslam Ali Rachedi, président du parti non agréé Essabil, s’appuie sur d’autres éléments d’analyse pour qualifier la prochaine élection de «dernière occasion pour un changement ordonné et pacifique du système». «Maintenir le statu quo au-delà de cette échéance n’est tout simplement pas tenable. L’une des raisons, sans doute la plus importante, est la détérioration de plus en plus importante des équilibres budgétaires avec un accroissement inévitable des dépenses et des ressources pétrolières en baisse», écrit-il.
Se référant aux prévisions des experts en énergie qui tablent sur une chute du prix du baril du pétrole à 50 dollars en 2017 contre 110 dollars aujourd’hui, Abdeslam Ali Rachedi évoque des risques d’un grave déséquilibre budgétaire du pays à partir de 2014. «L’ampleur du déficit sera telle que les disponibilités du Fonds de régulation des recettes seront totalement consommées en 2 ou 3 ans. La solution préconisée par le FMI, c’est-à-dire supprimer les subventions, ne pourra se faire, en tout état de cause, que progressivement et se heurtera inévitablement à la colère de la rue. Or le régime algérien ne survit qu’en gaspillant des ressources précieuses, en achetant la paix sociale pour masquer son absence de légitimité. S’il n’y a pas de changement, la situation risque de se détériorer encore plus vite pour déboucher sur une explosion inévitable», conclut-il.